Le Yoga pour Kiran Vyas

Kiran Vyas,  fondateur-directeur de TAPOVAN OPEN UNIVERSITY Yoga & Ayurvéda

La pratique du Yoga depuis l'enfance

C’était bien avant que j’ai 6 ans, mes parents, leurs amis et beaucoup d’autre personnes, collègues de mon père qui travaillaient avec Gandhi, pratiquaient le yoga, c’est-à-dire pratiquaient les asanas, le pranayama, la méditation, les mantras etc. …
Entre eux ils disaient que même lorsqu’ils étaient en prison pour le mouvement de l’indépendance de l’Inde, ils continuaient à pratiquer. Mon père avait même mis ses deux couvertures en laine bien étalées sur le sol, comme un tapis dans sa cellule, et tout le monde appelait cette cellule la salle de méditation de la prison centrale de SABARMATI à Ahmedabad dans le Gujarat.
Surtout, tous ces adultes après avoir terminé leurs discussions sur la politique et sur le mouvement de non violence pour l’indépendance de l’Inde, abordaient toujours les sujet du Yoga et de la métaphysique, sujet qui semblait les passionner. Même tard dans la nuit, quand la lune se couchait, leurs discussions continuaient.
Un jour, je pose la question à mon père : « Enfin, c’est quoi le yoga ? ». Tout le monde fut surpris de cette question venant d’un jeune garçon de moins de 6 ans. Après un long silence, la réponse de mon père vint, elle était très intéressante, il me dit : « Savoir être heureux et dans l’état de joie à chaque instant de la vie, c’est le yoga ». Tous ses amis furent très impressionnés par cette belle réponse à un petit enfant. Et moi je me disais « Pourquoi faut-il mettre la tête en bas et les pieds en l’air ? Pourquoi faut-il respirer par la narine droite ou la narine gauche ? Si l’objectif du yoga est d’être heureux, c’est facile ! Pourquoi vouloir rester assis en lotus des heures, ce n’est pas le chemin pour être heureux. ».
Je ne sais pas à vrai dire quand j’ai attrapé le virus du yoga, mais il y a quelque temps je feuilletais le journal que j’écrivais à l’age de 9 -10 ans et où j’avais écris à une date particulière : « Ce matin, je ne me suis pas levé à 4h1/2 du matin, c’est pourquoi je n’ai pas pratiqué mes postures et ma méditation ». J’en conclus en lisant cela que je me levais à cette heure pour pratiquer le yoga.

 

Une signification pleine de sens

Le mot Yoga est bien connu de tous que ce soit en Occident ou en Orient. Son origine est indienne, et le mot est dérivé de la racine sanskrite JUG qui signifie joindre ou union : le yoga est l’union de Soi avec l’absolu. C’est comme cela que l’on définit et décrit le yoga.

En Occident, le yoga est plus connu par la pratique du hatha yoga et surtout par les asanas ou postures de yoga. C’est pourquoi ce qu’on appelle en général le yoga est le hatha yoga ou le yoga du corps. HA signifie soleil ou l’énergie active et THA signifie la lune ou l’énergie réceptive.

Le hatha yoga est principalement le yoga du corps.

Les piliers du Yoga

Patanjali est un des maîtres incontournable du yoga. Il a établi les 8 piliers du yoga qui sont l’axe et la colonne vertébrale du yoga.

1) YAMA
Le yoga de la vie sociale ou le citoyen idéal
Les 5 règles de Yama sont
• AHIMSA : la non violence
• SATYA : insister sur la vérité ou ne pas mentir
• ASTEYA : ne pas voler
• BRHAMACARYA : la maîtrise de la sexualité et se consacrer à une vie d’étude
et de spiritualité
• APARIGRAHA : le non stockage des choses

2) NYAMA
Le yoga de l’individu ou les bases nécessaires pour le développement intérieur
Les 5 règles de NYAMA sont
• SHAUTCHA : la purification
• SANTOSH : le contentement
• TAPAS : l’ascèse avec la discipline régulière et l’endurance
• SWADHYAYA : l’étude soi
• ISHARAPRANIDHAN : adhérer à une conception du Divin

3) ASANAS
Les postures de yoga

4) PRANAYAMA
La maîtrise de la respiration ou la maîtrise du PRANA, l’énergie vitale

5) PRATHYARA
Le retrait des 5 sens pour les diriger de l’extérieur vers l’intérieur
En général les 5 sens nous donnent la connaissance du monde extérieur à nous. Ici on renverse le processus pour avoir la connaissance profonde et intérieure.

6) DHARANA
La concentration ou la capacité de diriger toutes nos facultés des énergies vers un seul objectif.

7) DHYANA
La méditation, la maîtrise totale de la pensée avec la capacité d’avoir le calme et le silence intérieur.

8) SAMADHI
L’expérience de la conscience cosmique

L’Occident a pris le 3ème pilier (asanas) et un peu du 4ème (pranayama) et c’est cela qui s’est répandu au nom du Yoga.
On peut compter plus de 84 000 asanas, postures de yoga.
Il existe une posture pour chaque corps, chaque âge, chaque événement, chaque humeur.
Ces asanas, postures du yoga, aident le corps physique, le physique subtil ainsi que le corps de prana, le corps d’énergie à être en bonne santé.
Au niveau du corps tout d’abord, cela développe la souplesse, la tenue verticale ainsi que la santé des organes internes (le cerveau, le cœur, les poumons, le foie, la vésicule biliaire, la rate, les intestins, etc.).

Ces postures ainsi que ces respirations de yoga vont travailler sur les sécrétions des glandes et surtout sur ce que nous appelons dans le langage du yoga les 7 chakras :
1) MULADHARA
Le chakra racine qui nous donne la capacité d’enracinement, de stabilité, représenté par la couleur rouge
2) SWADISTHANA
Le chakra de la créativité, de la procréation, représenté par la couleur orange.
3) MANIPURA
Le siège du pouvoir et de la vitalité, l’océan de l’Energie représentée par la couleur jaune.
4) ANAHATA
Le chakra du cœur, l’énergie de l’amour, le don de soi, représenté par la couleur verte.
5) VISHUDDHA
Le chakra de la purification et de la parole, représenté par la couleur bleue
6) AJNA
Le chakra du 3ème œil, de la vision intérieure, de l’intelligence et de la capacité de voir au-delà du temps et de l’espace, représenté par la couleur indigo.
7) SAHASRARA
Le chakra du lotus au 1000 pétales, la porte du ciel qui indique le chemin spirituel ou le chemin de la conscience cosmique, représenté par la couleur violette ou selon certaines traditions par une lumière blanche dorée.

Mais le yoga en toute simplicité, dans l’esprit indien est UN CHEMIN DE LIBERTE.

En Inde, le mot yoga signifie certainement un chemin intérieur et spirituel mais indique en même temps la liberté de l’individu : liberté vis-à-vis de la société, abandon de toutes les lois sociales du travail, de la famille, des enfants, et devenir un moine errant pour la recherche intérieure et spirituelle, abandon de toutes sortes de pratiques religieuses ou de croyances. Parce que pour le yogi, ce n’est pas la croyance qui est importante mais c’est l’expérience. Ce n’est pas croire à un Dieu ou à une divinité ou à un absolu ou à un moi ou à un soi, mais il faut selon le pratiquant de yoga trouver ce for intérieur, ce soi ou ce moi. C’est ce qui est important, quelque soit la méthode utilisée.
C’est ainsi que beaucoup de méthodes sont venues avec de nombreux enseignants et maîtres qui ont décrit ce chemin pour aller vers cette découverte du soi.
Nous n’allons pas décrire toutes ces méthodes, nous allons simplement retenir le concept premier de liberté et retenir également l’objectif final de cette découverte du soi.

L’être humain vit dans son mental de surface ou dans son corps ou dans son émotionnel. Il peut par le processus du yoga, se réveiller à son vrai être intérieur et trouver plus possibilités de beauté, d’harmonie, d’énergie et de connaissance. C’est-à-dire que le 1er processus de yoga n’est rien d’autre que de s’ouvrir, de se retrouver, de trouver son for intérieur qui est son âme véritable et le véritable acteur, voyageur ou passager sur la Terre.
Je dois vous exprimer ici l’image décrite dans la Gita, un des livres de l’Inde : l’homme et sa vie, y sont décrit comme un voyage ou plutôt comme un combat. Ce combattant, ce voyageur se trouve dans un char.
En réalité le char symbolise le corps physique, les chevaux qui tirent ce char représentent les énergies vitales, le chauffeur ou le cocher qui conduit ce char est le mental, mais celui qui voyage, celui qui est à l’intérieur est l’âme ou le véritable individu, le véritable passager sur la Terre.
En général, on identifie le « Je » avec le corps physique ou le « Je » avec le vital ou le corps émotionnel et énergétique, ou encore on l’identifie avec le mental ou le corps de pensée ou de l’esprit. Mais nous oublions le véritable être, ce passager qui est le corps psychique ou spirituel, l’âme intérieure.

L’Inde croit en une solution, une évolution : de la pierre vers la plante, de la plante vers l’animal, de l’animal vers l’homme et de l’homme vers un être au-delà de l’homme, un être supramental, un être au delà du mental, un être de Vérité, de Conscience et de Béatitude exprimé en sanskrit par TAT (vérité), CHIT (conscience) et ANANDA (béatitude).

La Nature nous fait évoluer depuis des milliers d’années en suivant ce principe d’évolution. Arrivé à l’époque de l’être humain, avec le développement du manas, l’esprit ou le mental.
L’homme a le choix de participer activement à cette évolution ou de ne pas y participer, ou même d’aller en opposition. D’ailleurs selon les sages, le mental est à la fois une aide et une entrave. Ce mental, au nom de la pensée, est très souvent la raison qui nous fait faire des détours incroyables au lieu de suivre un chemin plus direct. C’est un peu comme le chauffeur de taxi dans les grandes villes du monde qui nous emmène faire un tour de la ville avant de nous amener à destination en disant qu’il y a des bouchons, des travaux, … etc .
Le mental prend souvent des chemins détournés. Mais lorsque le mental collabore et qu’il réorganise la vie pour évoluer, alors l’évolution de la nature peut s’accélérer avec plus de rapidité. Cette participation du mental, cette réorganisation dans le langage humain s’appelle éducation. Et d’ailleurs l’humain a trouvé maintes méthodes de pédagogie pour soi, disant progresser et même évoluer.
Les sages de l’Inde, appelés les rishis, les visionnaires, ayant la connaissance occulte et spirituelle, ont trouvé encore un autre chemin : un chemin avec une très grande vitesse qui s’appelle le yoga. On pourrait presque dire que l’on le veuille ou non, par la force de l’évolution, on doit évoluer, on doit progresser.
Les premières lignes de cette évolution ont déjà été faites par la Nature Mère.
Avec l’éducation et le mental, l’homme a commencé de collaborer à cette évolution.
Mais avec le yoga, on se trouve sur une véritable autoroute de l’évolution, là où il n’y a ni croisement, ni feu rouge. Le seul objectif est ici de garder une vitesse constante, de progresser et d’évoluer.
Selon les sages indiens, tout travail qui nous mène vers la perfection est un yoga.
En d’autres termes, tout ce qui élargi notre conscience est un yoga.
Finalement c’est toute la vie qui devient yoga.

Bien sûr, il y a le yoga de la nourriture, où on essaye de manger sainement une nourriture biologique, organique et végétarienne, qui a des valeurs de plus en plus satviques (on divise l’alimentation en 3 catégories – satvique : ce qui nous apporte l’énergie de la lumière et de la légèreté – rajasique : ce qui nous apporte la vitalité force pouvoir – et tamasique : qui est une énergie potentielle, mais en général cela nous apporte la paresse, l’ignorance et l’obscurité).

Il y a aussi le yoga le plus important, celui où l’on pourrait presque dire que c’est le plus facile : le karma yoga, c’est-à-dire travailler, travailler, et encore travailler.
Ce n’est pas pour devenir un « work-addict », mais pour travailler avec une conscience de perfection, travailler pour le bien de l’humanité, travailler sans intérêt personnel de l’ego mais pour le progrès.

Il y a aussi les mantras ou le chemin du tantra, où rien n’est négligé et on est sans entraves, ni inhibitions pour rechercher l’union et la fusion des énergies.

En fait, il y a mille et une méthodes de pratiques de yoga.
Chaque enseignant, chaque maître a sa propre version mais elle reste toujours basée sur les grands principes donnés par les grands maîtres de yoga.

Le yoga intégral, cette synthèse exceptionnelle de tous les yogas, faite par Sri Aurobindo et la Mère est le Yoga de transformation de chaque cellule de notre corps. Dans ce yoga, on considère qu’il n’y a pas simplement l’évolution mais qu’il y a aussi l’involution. C’est-à-dire que l’absolu ou le Divin est descendu dans la matière, dans le subconscient, dans l’inconscient profond et c’est cela qui recommence son chemin, en évoluant et en redevenant à la fin l’absolu, le Divin. Pour faire cela, il faut simplement s’abandonner à son For intérieur, à sa lumière intérieure qui deviendra notre guide, notre maître pour faire ce chemin. La vie qui est une illusion douloureuse, très souvent avec l’aide du Divin, avec l’aide cette lumière intérieure devient félicité …

Autant étant enfant, je trouvais qu’être heureux était simple, autant après soixante de pratique, en essayant « d’observer les pensées, de surveiller les pensées, de contrôler les pensées et de maîtriser les pensées », je dirai avec humilité que le silence intérieur, la félicité et la joie de vivre ne sont aussi faciles que je l’imaginais, mais que ce chemin est passionnant !

Kiran VYAS